Prolapsus : des symptômes au diagnostic (Interview du Pr. Bernard Jacquetin)
Les prolapsus, ou descentes d’organes, sont des motifs de consultation de plus en plus fréquents. Pourtant, cette maladie reste encore trop souvent taboue. Nous avons interrogé le Pr. Bernard Jacquetin, chef du service de gynécologie obstétrique de l’Hôtel Dieu (Clermont-Ferrand), spécialiste de cette pathologie.
Quels sont les symptômes duprolapsus ?Pr. Bernard Jacquetin : Ilssont assez peu caractéristiques. Les femmes ont unesensation de “boule vaginale“ ou de pesanteur au niveau du pelvis,du périnée ou du rectum. Cette impression augmentelorsqu’elles font des efforts physiques, comme de longues marchespar exemple, et diminue après quelques minutes de repos enposition allongée. Il existe également des signesindirects dus à la descente des organes, tels que desdifficultés à uriner ou à évacuer lesselles.Ainsi, certaines femmes connaissent une aggravation de leurconstipation et a contrario, la disparition d’une éventuelleincontinence urinaire d’effort.Au cours de l’entretien avec son médecin, la patiente avoueparfois devoir remonter sa vessie, grâce à desmanipulations intimes pour pouvoir aller aux toilettes.Une récente étude permetpour la première fois de déterminer la proportion desfemmes touchées par le prolapsus. Et ces chiffres sontétonnants…Pr. Bernard Jacquetin : Leprolapsus concernerait 45 % des femmes âgées de 45à 85 ans… Ces chiffres peuvent surprendre. Cependant, onne disposait jusqu’alors d’aucune donnée parfaitementfiable. Les précédentes études reposaient surun entretien téléphonique, une méthode quin’exclut pas les réticences à avouer ou ladifficulté à diagnostiquer un prolapsus (en dehorsdes formes extériorisées bien évidemment).L’étude hollandaise à laquelle vous faitesréférence est la première à concernerautant de femmes et à être allée jusqu’àl’examen médical. Ainsi, le chiffre de 45 % des femmes de 45à 85 ans concernées par cette pathologie esttrès certainement le plus fiable. Même si cela nesignifie pas qu’elles sont toutes handicapées par cettemaladie.Qu’entendez-vous par là?Pr. Bernard Jacquetin : Pourl’incontinence urinaire, on estime que 50 % des femmes connaissentdes fuites mais que simplement 10 % en éprouvent uneréelle gêne. Si l’on applique le mêmeraisonnement au prolapsus, cela veut tout de même dire qu’unefemme sur 10 est gênée par cette descente d’organes.Par ailleurs, les formes extériorisées ne sont pasaussi rares que prévu, puisqu’elles concerneraientprès de 12 % des femmes de 45 à 85 ans.Quels sont les principaux facteurs derisque du prolapsus ?Pr. Bernard Jacquetin : Leprolapsus est la conséquence d’un relâchement dupérinée ou d’une perte d’élasticité duplancher pelvien. Plusieurs facteurs peuvent augmenter ce risque:
– Le principal est l’accouchement, surtout en cas de grosbébé (macrosomie) ou de traumatismepérinéal. L’utilisation des forceps entraîne unrelâchement plus important du périnée etaugmente ainsi les risques de prolapsus. L’épisiotomiediminue le risque de déchirure grave dupérinée, mais aucune étude ne montre qu’elleprévient les prolapsus . L’examen post-natal, 6 à 8semaines après l’accouchement, est le moment idéalpour répertorier les conséquences de ce traumatismeobstétrical.
– Mais toutes les femmes ne sont pas égales face àcette maladie, ainsi il existe un facteur congénital defaiblesse héréditaire des tissus conjonctifs. Chezces femmes souffrant de prolapsus (particulièrement àun jeune âge), on retrouve une histoire familiale deprolapsus due à une « mauvaise qualité »du tissu conjonctif (du collagène notamment) ;
– Par ailleurs, certains facteurs peuvent entraîner uneaugmentation de la pression intra-abdominale : efforts physiquesà répétition (liés à certainesactivités professionnelles), constipation, bronchite,asthme, surcharge pondérale ou obésité. Parles bronchospasmes qu’il entraîne, le tabagisme est unfacteur de risque indirect ;
– Enfin, la ménopause s’accompagne également d’uneperte d’élasticité des tissus conjonctifs en raisonde la baisse des estrogènes.Un prolapsus aura-t-il toujours tendanceà s’aggraver ? Certains facteurs peuvent-ilsaccélérer ou retarder cette évolution?Pr. Bernard Jacquetin :L’évolution est très variable, il n’y a pas defatalité vers le pire. On peut distinguer des prolapsusrelativement stables et d’autres aux évolutions importantes.Généralement face à une femme quin’éprouve pas de gêne fonctionnelle et neprésente pas de facteur de risque, je lui conseille derevenir me voir dans un délai d’un an à 18 mois.Néanmoins, la ménopause, une importante prise depoids ou au contraire un amaigrissement considérable peuvententraîner une aggravation du prolapsus. Il est ainsiimportant lors de l’entretien clinique de faire le bilan desfacteurs de risque et d’estimer la gêne ressentie par lapatiente.Comment est posé le diagnostic?Pr. Bernard Jacquetin : Dansses formes extériorisées, le diagnostic du prolapsusest aisé pour le médecin comme pour la patiente. Maisdans ses formes débutantes, le prolapsus estdiagnostiqué par un examen cliniquesystématisé. Après l’interrogatoire clinique,le médecin pourra juger, par toucher vaginal et auspéculum, les organes concernés par la chute(ptôsés), en demandant au besoin à la patientede fournir un effort.Quels sont les prolapsus quirelèvent d’une prise en charge médicale?Pr. Bernard Jacquetin : Endehors des prolapsus extériorisés, la prise en chargedépend assez largement de la gêne ressentie. Outre lessymptômes indirects déjà mentionnés, lasensation d’oeuf vaginal est parfois mal supportée par lapatiente qui souffre d’une altération de son imagecorporelle. Elle peut également avoir peur d’une aggravationdu prolapsus (peur de perte des organes). Enfin, larépétition des infections urinaires ou la gênelors de loisirs peuvent motiver une prise en charge. La peur duregard du conjoint lors des moments d’intimité est souventrapportée, même si bizarrement, la gêne sexuellesemble, selon les études, assez limitée (les rapportsse déroulant le plus souvent en position allongée).Mais aujourd’hui, fort heureusement, on peut envisagerdifférents traitements qui permettront aux femmes de renoueravec leur image corporelle.Propos recueillis par David Bême, le 17 septembre 2004Click Here: cheap INTERNATIONAL jersey