Cancer : vers un système de soins centré sur le patient ?

April 29, 2020 0 By JohnValbyNation

Depuis les premiers Etats généraux sur le cancer en 1998, l’implication des patients dans leur prise en charge a fortement évolué. Les structures et l’organisation des soins se sont-elles adaptées à cette récente prise de paroles et de décision des patients? A quelques mois de la présentation du 3èmePlan Cancer et de la remise du rapport sur “la représentation des usagers dans les établissements de santé“, cette question a largement été abordée lors des 6èmes Rencontres de la cancérologie française.

Centrer le système de prise en charge sur le patient implique des adaptations des professionnels, des établissements et de l'organisation même des soins.

Ne plus traiter une tumeur mais traiter un patient… et l’écouterEn 1998, les premiers Etats Généraux des malades atteints de cancer, organisés par la Ligue contre le cancer, mettaient en lumière la nécessité d’impliquer davantage les patients dans le processus de soins. Au-delà de la prise en charge du cancer, il était temps de prendre en charge le patient atteint de cancer dans sa globalité. Depuis, l’implication des “soignés“ dans le processus de soins a fortement évolué, les patients et leurs représentants n’ont eu de cesse de s’imposer au cœur des systèmes de soins, dont ils se sont trop longtemps sentis exclus. Le temps où le malade écoutait patiemment le médecin est révolu et les nouveaux modes d’information et de dialogue qu’offre Internet n’y sont certainement pas étrangers.Aujourd’hui, les associations ne veulent plus se cantonner aux questions de la sécurité des soins et de la qualité de vie. Elles veulent intervenir sur d’autres fronts : l’écriture des référentiels de l’Inca ou de la HAS, la relecture des protocoles de recherche, le cursus des étudiants en médecine ou en soins infirmiers, l’organisation des soins…Cette volonté se heurte encore à plusieurs problèmes liés à l’organisation des soins, la tarification des actes… voire à la volonté de l’ensemble des acteurs de laisser au-delà des déclarations de bonnes intentions, une réelle place au patient désormais acteur de sa prise en charge.Une nécessaire adaptation de l’organisation des soinsPour Véronique Trillet-Lenoir, oncologue médicale, CHU de Lyon et Présidente du comité de direction du Cancéropôle Lyon Auvergne Rhône-Alpes, “La présence, toujours plus marquée, des malades et leurs représentants, y compris, dans l’organisation des soins, pousse les professionnels à s’adapter“. Une démarche salvatrice pour aller vers plus de démocratie sanitaire ? Ce sujet était au coeur des Rencontres de la Cancérologie Française 2013.Dès la session d’ouverture, Laurent Degos, ancien président de la Haute Autorité de Santé (HAS), pose les bases de la nécessaire adaptation des professionnels de santé à cette prise de parole et de décision des patients. Favoriser la coopération entre professionnels de santé, modifier la tarification à l’acte pour mieux valoriser un parcours de soins du patient et non seulement des actes impliquant une hospitalisation, mieux former le soignant en ce sens sont autant de pistes évoquées. Face à une démographie médicale en baisse constante, cette évolution du système de soins pourrait impliquer la création de nouveaux métiers, permettant aux patients de mieux s’orienter dans le système de soins, de mieux préparer sa sortie.A l’heure où le traitement de certains cancers s’apparente de plus en plus à celui d’une maladie chronique, on peut également s’étonner qu’alors que l’éducation thérapeutique (fortement valorisée pour des maladies comme le

diabète ou

l’asthme) reste aussi peu présente en oncologie. Une situation qui pourrait devenir d’autant plus problématique que les traitements ambulatoires (sans hospitalisation) devraient être de plus en plus fréquents.Un contexte médico-économique particulier…Le patient réussira à acquérir une place d’autant plus légitime dans sa prise en charge qu’il sera bien informé. “L’un des principaux leviers est d’améliorer l’information du patient pour réduire alors l’asymétrie des savoirs entre soignants et soignés. Un travail sur cette symétrie des savoirs et donc sur les langages employés est en ce sens important“ précise le Pr Laurent Degos.La monté en puissance de ce “patient expert“ se fait dans un contexte médico-économique particulier marqué par des restrictions budgétaires, une démographie médicale en forte régression et un système français très centré autour de l’hôpital. Daniel André, administrateur de l’association France Lymphome, est lui-même touché par la maladie : “Les progrès thérapeutiques sont une très bonne chose pour les malades. Mais nous nous inquiétons des conséquences de l’irruption de la dimension médico-économique. Nous avons peur que la situation ne se dégrade. Notre rôle d’association est aussi de mobiliser pour que les malades puissent continuer à profiter de toutes les chances offertes par l’innovation“.En termes d’informations, les choses se sont améliorées notamment grâce aux deux premiers plans cancers et la mise ne place de dispositifs d’annonce, de parcours de soins dédiés à certaines populations comme les seniors et les enfants… “Tout n’est pas parfait mais à l’heure où on compte de moins en moins de médecins, où se développent les prises en charge ambulatoires (avec des traitements en un jour pour certains cancers), les professionnels ont une réelle volonté d’informer le patient. Mais ils font ce qu’ils peuvent dans le système actuel“ tempère Sylvie Négrier du Centre Léon Bérard de Lyon. Et il est vrai que les professionnels sont aujourd’hui plus sensibilisés et plus sensibles à cette attente de leurs patients.Demain, quelle représentation des usagers dans les établissements de santé ?Est-ce à dire que le problème est insoluble et qu’en termes de “système de soins centré sur le patient“, on fait déjà le maximum ? Ce n’est pas l’avis de Claire Compagnon, à l’origine des Etats-Généraux de 1998, qui s’est toujours battue pour le droit des patients et pour que leur parole soit relayée dans l’espace public. En mai 2013, la Ministre de la santé, Marisol Touraine, lui a confié une mission sur la représentation des usagers dans les établissements de santé. Elle s’inscrit dans le prolongement des propositions du rapport remis par Edouard Couty sur le

pacte de confiance pour l’hôpital.Sa première mission est de faire un bilan des modalités et de l’impact de la représentation des usagers dans les établissements de santé et une étude des expériences étrangères. L’objectif final sera de proposer des nouvelles étapes de développement de cette représentation des usagers. Selon elle, “la France pourrait aller beaucoup plus loin dans l’implication des usagers, comme au Québec, où un patient dirige, au sein de la Faculté de médecine, un département dédié à l’expertise de patients-partenaires“.Cette présence à tous les niveaux des représentants de patients impose aux professionnels de santé de s’adapter et d’intégrer les patients et leurs représentants de façon effective, comme des partenaires dans l’organisation des soins d’aujourd’hui et dans la préparation de celle de demain. Un changement de logique pour l’approche française plus focalisée sur les droits du patient. Tirant profit de nombreuses auditions et des expériences intéressantes conduites à l’étranger, son rapport devrait explorer plusieurs scénarios en termes de gouvernance, de prise de décision et de fonctionnement des soins. Il sera remis à la ministre de la santé avant la fin de l’année et devrait être rendu public début 2014. Au-delà des déclarations de bonnes intentions, l’écho qu’il recevra nous permettra de juger de la réelle volonté politique d’impliquer les patients dans les établissements de santé, et plus globalement dans le système de soins. David Bême Sources : “Les systèmes de soins centrés sur le patient : quelles adaptations pour les professionnels de santé ?“ – Plénière du 6 novembre 2013 – Rencontres de la cancérologie française 2013 (Lyon)Conférence de presse du 6 novembre 2013 – Rencontres de la cancérologie française 2013 (Lyon)Click Here: New Zealand rugby store