Pollution de l'air : 90 pesticides doivent être mieux surveillés
L’exposition de la population aux pesticides présents dans l’air ambiant est "difficile à estimer" et devrait être mieux documentée, a estimé jeudi l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), recommandant la surveillance de 90 substances prioritaires.
Les expositions alimentaires à ces substances sont "de mieux en mieux connues", mais la contamination de l'air et ainsi les risques d'inhalation ou d'exposition par voie cutanée beaucoup moins.
La contamination aérienne par des pesticides reste mal connueLa connaissance des niveaux de contamination en pesticides dans l’air est “partielle et hétérogène“, alors que “des études épidémiologiques mettent en évidence des associations entre des expositions aux pesticides et différentes pathologies chroniques“, note l’Anses dans cet avis.Les expositions alimentaires à ces substances sont “de mieux en mieux connues“, mais la contamination de l’air et ainsi les risques d’inhalation ou d’exposition par voie cutanée beaucoup moins.L’Anses recommande donc de mettre en place “une surveillance nationale” pour évaluer “l’exposition chronique” de la population à ces produits (substances chimiques entrant dans la composition de produits phytopharmaceutiques, biocides, médicaments vétérinaires et antiparasitaires à usage humain).En croisant la probabilité de présence de ces substances dans l’air et leur danger potentiel, l’Agence a identifié 90 substances “hautement prioritaires” ou “prioritaires” et préconise qu’elles fassent l’objet d’une campagne de mesures pendant un an.Certains de ces produits sont considérés d’emblée comme présents dans l’air et devant être surveillés à plus long terme dans le cadre d’une “stratégie de surveillance nationale à mettre en oeuvre ultérieurement“.Parmi eux notamment le fipronil, à l’origine l’été dernier d’une crise liée à la découverte d’oeufs contaminés par l’insecticide dans plusieurs pays européens, ou encore le lindane, substance “persistante” pourtant interdite pour les usages agricoles en France depuis 1998.Le glyphosate est-il présent dans l’air ?La campagne de mesures doit en revanche permettre pour d’autres substances dont la présence dans l’air n’est pas aussi certaine, d’évaluer la pertinence de leur surveillance à plus long terme, comme le glyphosate. Cet herbicide, principe actif du produit phare de la firme américaine Monsanto, le Roundup, est au centre d’une controverse en Europe.L’Union européenne doit se prononcer prochainement sur le renouvellement pour dix ans de la licence du glyphosate, que le Centre international de recherche sur le cancer, un organe de l’OMS, a classé “cancérogène probable” en 2015, contrairement aux agences européennes, l’Efsa (sécurité des aliments) et l’Echa (produits chimiques).Cette campagne de mesures devrait être conduite par l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) et les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA), a précisé l’Anses.Les AASQA sont déjà chargées de mesurer la qualité de l’air et d’alerter en cas de pollution au dioxyde d’azote ou aux particules fines, mais les données relatives aux pesticides ont jusqu’à présent été collectées par le biais d’initiatives locales et ponctuelles. Des campagnes particulières pour les personnes les plus à risque d’expositionL’Agence recommande également de mettre en place des “campagnes particulières permettant notamment d’évaluer l’exposition des populations vivant à proximité des sources d’émissions de pesticides : riverains des zones agricoles, gares et aéroports, zones industrielles, silos, proximité de zones où la lutte anti-vectorielle est mise en œuvre, etc“.Toutes ces recommandations de l’Agence seront utilisées dans le cadre de l’étude menée par l’Anses et Santé Publique France sur l’exposition des riverains de zones agricoles (qui combinera des mesures environnementales à des “mesures d’imprégnation dans des milieux biologiques humains” (urine, cheveux…).L’Anses précise enfin que la liste des substances à surveiller “devra être complétée ultérieurement au regard du risque pour les écosystèmes et prise en considération pour mieux renseigner l’exposition humaine aux pesticides dans les environnements intérieurs“.